dimanche 24 septembre 2006

GARDIENS DE LA FLAMME

C’est de Norvège qu’arrive, en 1985, l’énorme tube de trois garçons très dans le vent, Morten, Paul et Magne, considérés alors par les médias du monde entier comme les membres du premier boys band des 80’s. Take On Me, premier single et surtout premier vidéoclip de l’album Hunting High and Low, fera le bonheur mais aussi le malheur d’un des groupes les plus intéressants de ces 20 dernières années. Car contrairement à ce que beaucoup pensent, les membres du groupe dont je vais vous entretenir sont d’authentiques musiciens, avec un avant et surtout un après Take On Me.
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En 1982, deux musiciens, Paul Waaktar-Savoy (guitariste, né le 06/09/1961) et Magne Furuholmen (clavier, né le 01/11/1962) deux fans des Doors et de Joy Division, proposent à Morten Harket (chanteur, né le 14/09/1959) de rejoindre leur duo pour fonder un groupe dont le nom sera inspiré l’un des titres de Jim Morrisson, leur idole : a-ha, onomatopée dont les dictionnaires leur confirment qu'elle signifie, dans toutes les langues, l'étonnement, la surprise, le plaisir, le rire ou la satisfaction.

Lors d’aller-retours entre l'Angleterre et la Norvège, ils rencontrent John Ratcliff et Terry Slater (le "découvreur" de Queen) qui deviennent leurs managers. Andy Wickham, responsable de Warner Bros UK signe le groupe en décembre 1983. L'album Hunting High and Low sort, mais le single Take on Me, 1er extrait, passe complètement inaperçu. Un des dirigeants américains de la firme, Jeff Ayeroff, convaincu du potentiel du morceau, leur demande de le remixer. L’astucieux Steve Barron est solicité pour mixer réalité et fiction dans un vidéoclip tellement réussi qu’il va malheureusement coller à l’image du groupe pendant de nombreuses années. Take on Me se classe immédiatement dans le Top 20 américain. Le 9 Octobre 1985, a-ha est n° 1 aux USA ! Et ce n'est qu'un début. Take on me, tube planétaire, est le titre le plus programmé dans les radios européennes à cette période et pendant de nombreuses semaines. Le groupe est propulsé au top des hit-parades avant même d'avoir eu le temps de développer un véritable langage musical. Suivent d’autres singles dont le tendre Hunting High and Low (donnant son titre à l’album) qui laisse d’ores et déjà supposer de futures orientations artistiques plus complexes.
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a-ha se remet au travail et entre en studio à Londres en avril de la même année. I've Been Losing You précède de quelques mois la sortie de l'album Scoundrel Days qui confirme tous les espoirs des critiques et du public. Toujours la même pop rock sensible et sophistiquée, empreinte d'un charme infaillible et d'une douce mélancolie. Pourtant Scoundrel Days est différent, moins évident. A l’image de la ligne graphique de l’album, il est une invitation à l’élévation et au voyage espace/temps comme dans October, ballade automnale, véritable apologie de calme et de quiétude, ou dans l’excellent Manhattan Skyline, titre ovni inégalé. Il permet dès lors d’appréhender le groupe différemment et le dissocie d’un grand nombre de produits superficiels émergents de l’époque.

Suivra, en 1987, un troisième album plus léger et moins intéressant, Stay on This Roads, puis celui qui amorcera l’ébauche d’un nouveau tournant East of the Sun West of the Moon. Nous sommes en 1990 et le groupe espère se débarrasser, enfin, du "public de boys band" qui ne lui correspond plus.
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En 1993, Memorial Beach confirme la baisse d’intérêt du public pour nos trois norvégiens dont les nouveaux choix artistiques déstabilisent. Pourtant Memorial Beach propose ce que le groupe sait produire de mieux . Il enchaîne carrément trois des meilleurs morceaux que le groupe ait jamais composé : Cold as Stone, magnifique complainte dépassant les 8 minutes, Angel in the Snow, douce mélopée sentimentale, puis Locust, sombre mélodie nostalgique. L’album se clôt sur le titre le plus apaisé, le plus mature, Memorial Beach lui-même, une petite leçon de simplicité.
Les trois compères vivront mal l’échec Memorial Beach et a-ha cessera d'exister plusieurs années. Chaque membre du groupe entreprend alors une carrière solo :
- Morten Harket sort 3 albums,
- Paul Waaktaar-Savoy forme Savoy avec son épouse et sort 4 albums entre 1996 et 2001,
- Magne Furuholmen s'adonne à sa passion, la peinture, et s'associe avec Kjetil Bjerkestrand avec qui il écrit des musiques de film.
Fin 98, le groupe se reforme le temps d’interpréter une nouvelle chanson, Summer Moved On, lors de la remise du prix Nobel de la paix. Forts de ces retrouvailles, Paul, Mags et Morten décident de retravailler ensemble.
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Ils sortent l’un des meilleurs opus de leur carrière Minor Earth Major Sky en 2000 mais Warner ne le distribue pas mondialement. La promotion est déficiente, l'album passe inaperçu, notamment en France, mais enregistre pourtant des ventes exceptionnelles en Europe (Allemagne, Norvège). Summer Moved On y est repris différemment et s’intègre à une ambiance générale fluide. Les textes pourtant plus "politiques" et plus critiques que de coutume, balancent sur des rythmes assez légers, oscillant entre la pop, la folk et certains tempos plus électroniques, l’ensemble se détachant considérablement de l’atmosphère lourde de Memorial Beach.
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En 2002, déboule Lifelines, dans la droite lignée de son prédécesseur mais plus sophistiqué et pop, flirtant aussi bien sur des ambiances rock que carrément électro. Très bien produit (peut être trop) notamment par Stephen Hague (Blur, New Order, Marc Almond…) et très varié (peut être trop) Lifelines souffre néammoins d’une certaine déstructuration peut être due au nombre incroyable de producteurs qui se sont succédés lors des cessions d’enregistrement.

Désappointé par le manque de motivation de leur maison de disque à promouvoir leurs dernières productions, a-ha sort un ultime live enregistré sur la tournée précédente. Ils décident ensuite de rompre le contrat qui les lie à Warner pour signer chez Universal et se lance dans la réalisation de ce qui est, à ce jour, le dernier album du groupe. Analogue, paru en 2005, a l’atmosphère "Beatlesienne". Les arrangements 70’s contrastent avec les tempos modes trop utilisés (certes souvent à bon escient) sur Lifelines, et dévoilent la qualité des compositions en renforçant la ligne mélodique de chacune. Même la voix de Morten est travaillée différemment de sorte qu’elle se fond radicalement dans les instrumentations tour à tour rock, folk ou pop, qui auraient presque pu être écrites il y a 30 ans par un quatuor auquel presque tout Analogue fait référence. Le point d’orgue de l’album (et peut être le deuxième de la carrière du groupe après le Manhattan Skyline de Scoundrel Days) est sans aucun doute le très touchant Keeper of the Flame, démarrant sur un piano que ne renierait pas McCartney et dont le refrain, véritable envolée mélodique, emporte loin, très loin celui qui s’y laisse prendre.
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Aujourd’hui qu’en est-il de l’image du groupe auprès du public, notamment le public français qui a toujours catalogué a-ha comme boys band, même 20 ans après son apparition ? Le mieux finalement serait de se faire sa propre opinion en oubliant quelques instants Take On Me pour aller vers ce que le groupe sait faire de mieux, des ballades rock mélancoliques, intimistes, universelles et … sincères.

Vous trouverez une mine d’informations passionnantes sur le site français qui leur est consacré, aha-fr.com, dont je me suis beaucoup inspiré (cliquez sur le titre de l’article pour y accéder), ainsi que sur le site officiel du groupe.

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