lundi 9 février 2009

SOPHIE RISTELHUEBER

En marge de l’exposition phare dédiée au photographe Robert Franck, Un regard étranger, le Jeu de Paume présente jusqu'au 22 mars prochain la première grande rétrospective française consacrée à Sophie Ristelhueber.
Tout un étage ! Il n’en fallait pas moins pour dévoiler à un public amateur d’images, confronté à l’une des meilleures programmations de la capitale, le travail extraordinaire d’une artiste dont les débuts dans la photographie ont été marqué par ses collaborations avec les maîtres Doisneau et Depardon. Ici, s’imposant comme rarement dans la sobriété d’un espace parfois trop rigide, dévoilant par de simples astuces les multiples respirations, ouvertures et dialogues qu’il permet avec le jardin extérieur, le travail de Ristelhueber n’aurait pu être plus mis en valeur.
En son centre, point d’orgue d’une présentation implacable mais forte d’une sensibilité rare, Fait, une magnifique série « damier » gigantesque, en couleur et en gris réalisée en 1991 dans le désert du Koweït, au lendemain de la première guerre du golfe. Brouillant toute notion d’échelle, les 71 tirages qui la composent évoquent autant les troublantes scarifications sur des corps improbables que des œuvres abstraites. 


Autour, dans les salles aérées, se côtoient les paysages dévastés de Beyrouth (Beyrouth, Photographies, 1984), et des images de corps suturés, un hommage fort et vibrant aux victimes du conflits serbo-croate (Every One, 1994), des clichés encadrés et extrêmement touchants de la maison de famille, pris à hauteur d’enfant, (Vulaines, 1989), et d’autres immenses, simplement collés sur le mur, inspirés par un attentat à la voiture piégée en Irak (Eleven Blowups, 2006) …


C'est un engagement, une démarche personnelle totale, sans concession, mais toujours empreints de sens et de délicatesse. Des histoires, des ruines, et des cicatrices, celles des corps, celles des territoires, … un regard pur, sans interventionnisme directif.
Un parti pris qui, au final, en appelle à la réflexion plus qu’à la contemplation, mais qui n’omet jamais la qualité et la puissance des lignes, ni cette confrontation indispensable à la matière, dont on sait qu’elles permettent instantanément d’ouvrir le dialogue avec l’œuvre. Une découverte !

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