jeudi 4 septembre 2008

NOIR C'EST NOIR

The Dark Knight : suite des aventures du plus schizophrène des super-héros version Nolan, ou ... naissance d’un mythe cinématographique en 2008. Appâtés depuis plusieurs mois comme de la petite friture par une bande-annonce incontestablement savoureuse, quelques quidams cinéphiles et spéculatifs que de nombreux mercredis mornes et fades laissaient sur leur faim attendaient avec une impatience non dissimulée le film de toutes les promesses. 

Objet d’une promotion malsaine exploitant abusivement la disparition prématurée d’une de ses nombreuses tête d’affiche, l’acteur Heath Ledger, mais pas celle d’un cascadeur victime d’un accident en cours de tournage (!), ce Dark Knight dont nous avions tout lieu d’espérer qu’il serait au moins à la hauteur de son prédécesseur, Batman Begins, et, de toute façon, bien supérieur aux pantalonnades kitchs et rétrogrades d’un Schumacher principalement attentif aux atouts physiques de ses stars masculines, s’avérait d’ores et déjà comme LE succès américain critique et commercial de l’année, renvoyant même au tapis le dernier volet des aventures d’un tisseur de toile moins convaincant qu’à l’accoutumée. 

Ainsi, enfin affublé, comme en sa fameuse époque Burtonienne, de méchants aussi spectaculaires et célèbres que les très attendus Joker ou Double-Face, le chevalier noir d’un titre inspiré par Miller, emporté par le brillant scénario des frères Nolan eux-mêmes, cumulant les références au meilleur d’un Michael Mann, brave les clichés et le premier degré assumé pour atteindre le chef-d’oeuvre. Chef-d’œuvre d’un genre, certes, mais l’esthétisme, glacial, et la violence, radicale, d’un propos dont l’actualité (une réflexion sur le pouvoir et sur l’époque) et l’intensité prennent ici le pas sur de savoureuses démonstrations de savoir-faire, parfois naïves mais bien venues qui, loin de plomber une intrigue fort complexe, l’enrichissent et la rendent palpitante. 

Fidèle à l’esprit de ceux qui ont le mieux compris l’aspect inquiétant de la célèbre chauve-souris dans ses nombreuses adaptations dessinées, Nolan s’éloigne de son personnage principal en en accentuant son isolement, son caractère maladif pour, comme Burton toujours en son temps, révéler ce qu’il a de si proche et d’ambiguë avec les cinglés qu’il combat, dans l’ombre de villes (Hong-Kong, Chicago) qu’une version absolument impeccable directement tournée en IMAX (six scènes … une première) permet, lors de diverses plongées dans l’abîme tourmenté du héros torturé, d’appréhender comme jamais jusque là au cinéma. 

Renforçant le mécanisme ultra perfectionné d’une machinerie hollywoodienne bien huilée à la sueur d’interprètes totalement investis dans leurs rôles (chapeau bas à Ledger, incroyable), le réalisateur captivé, ne cédant finalement que très subrepticement à un fantastique presque convenu, pas indispensable, mais pas gênant pour autant, porte le regard définitivement pessimiste mais totalement fascinant de celui qui observe ses jouets prendre vie. 

On pense à Blade Runner, on repense à Miller, et l’on est fasciné par une telle réussite. Indispensable, forcément !!!

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Rupert t'as pas dû bien suivre la campagne de promotion du film, parce qu'au contraire, ils se sont peu servi de l'image du Joker... Il était difficile de faire la promo sans parler du Joker puisque c'est lui que les fans attendaient, mais ils n'ont jamais joué sur la mort de Ledger...
On a parfois l'impression que dès qu'un mec est mort, il faudrait éviter parler du film parce que sinon, ça fait croque-mort à la petite semaine... Et puis cette remarque sur le cascadeur qui est mort, c'est de la bien pensance incarnée...
Pourtant, jusque là je te trouver relativement pertinent, même si je ne partageais pas tout le temps ton opinion.
Au passage, bon blog tout de même, merci d'être venu commenter sur le mien, ça m'a permis de découvrir des trucs et une opinion cinéphile diverse de la mienne... Mais là, quand même, Rupert, faut pas trop en faire lol

rupert a dit…

Je pense que tu es resté quelques temps sans utiliser ta souris, sans lire un magazine ou que tu es parti en vacances au pôle nord un peu avant l'été : peu importe, The Dark Knight est tout simplement gigantesque, Nolan est un excellent réalisateur et j'attends avec impatience la sortie DVD ...