LETTRE D'HÉLÈNE

Monsieur Le Président,

Vous ne serez pas étonné de recevoir une lettre de protestation au sujet de vos récentes déclarations sur les étrangers et de vos projets concernant la déchéance de nationalité.

Vous avez été élu Président de la République et par là-même avez accepté de représenter tous les Français quelque soit leur origine et non pas seulement ceux qui vous plaisent ; une société n’est pas faite seulement de citoyens beaux, riches, intelligents etc. Elle est faite de faibles et de forts, de malades et de bien portants, d’honnête gens et de moins honnêtes que l’on rencontre d’ailleurs dans toutes les classes de la société.

Vous n’êtes pas sans savoir que le chômage et non pas seulement la « perte d’autorité » mine la société et explique en grande partie son éclatement de plus en plus voyant. La misère gagne, la peur de l’avenir aussi, elle est mauvaise conseillère et non pas un argument électoral.
J’en suis venue à me demander si ce n’était pas votre « origine » qui vous permettait de penser que vous étiez exempt de toute critique concernant cette politique d’attaque contre les « français d’origine étrangère », car vous êtes en train consciemment de cautionner la xénophobie et la haine qui peuvent comme chacun le sait faire se dresser les citoyens les uns contre les autres en très peu de temps, l’exemple de l’ex-Yougoslavie n’est pas si lointain.

A propos « d’origine », il se trouve que, pour une part, nous avons la même : mon père était né à Salonique, naturalisé en 1927, dénaturalisé en 1940 par le régime de Vichy, vous savez pourquoi ; les juifs de Salonique ont été dénaturalisés en grand nombre, considérés comme des métèques comme d’autres, indignes de la nationalité française.

Quand vous allez déchoir de leur nationalité des délinquants avez-vous décidé jusqu’où remonter pour leur octroyer le droit de rester français même en prison et pour ceux qui ont un parent français et un autre étranger, lequel des deux va-t-il primer dans vos comptes ?
Il y a trop de pauvres, trop de chômeurs, trop de délinquants, croyez-vous vraiment que les enfants d’étrangers en soient les responsables, ils sont responsables de leurs actes, c’est tout.

Voilà ce qu’une vieille « enfant d’émigré naturalisé français » avait besoin de vous dire.