samedi 14 août 2010

INCEPTION

Cas d’école : quand on veut donner son avis sur une production de la trempe d’Inception, mieux vaut prendre son temps et un peu de recul, le recul juste nécessaire à ceux de ces films qui succèdent, dans le parcours d’un réalisateur qui compte, à ce qu’il est convenu d’appeler une référence.
C’était indiscutablement le cas de l’extraordinaire Dark Knight, qui tenait de l’aboutissement d’un style, d’un genre et qui a vu Christopher Nolan enfin reconnu pour la qualité de son travail, la spécificité de son univers. On peut donc presque dire qu’Inception arrive à point nommé. Pourquoi ?
Son auteur n’a plus à faire ses preuves, il peut presque laisser libre cour à son imagination, s’amuser sans presque avoir besoin de se soucier de l’attente : celle des studios, celle des critiques, celle du public. Après l’extraordinaire succès international du deuxième tome des aventures de son Batman Begins, Nolan a le monde à ses pieds. Et à Hollywood, le monde se résume à «peu » de choses : money and stars.

Les stars, c’est l’un des domaines de prédilection de Nolan, son capital indéniable, qu’il collectionne et transforme à sa guise au fil de scénarios complexes (Guy Pearce dans Memento, Al Pacino et Robin Williams dans Insomnia, Hugh Jackman dans The prestige, Heath Ledger dans Dark Knight … sans oublier ceux, récurrents, qu’on retrouve régulièrement tout au long de sa finalement courte filmographie : Michael Caine, Christian Bale ou encore Cillian Murphy), de simples instruments à sa merci, dans des films ciselés avec une précision d’orfèvre. Revenons à Inception.
Le canevas est pratiquement le même : LA star (la plus grande, la plus précieuse) et l’argent évidemment, mais cette fois le maître est seul à bord d’un scénario qu’il peaufine depuis dix ans déjà, et dans lequel il développe encre une fois ses thèmes récurrents : manipulation, mensonge, trahison. Jusqu’à leur paroxysme.
Et pour cause, car cette fois Nolan n’est pas décidé à faire dans la dentelle : Inception c’est son jouet, sa marotte, son James Bond (comme il le dit lui-même) un truc qu’il porte depuis de nombreuses années et qu’il a voulu dès le départ comme un divertissement complexe.
D’ailleurs, bien avant d’être un thriller à tiroir, Nolan l’avait imaginé comme un film d’horreur !
Rien de bien intellectuel dans tout ça me direz-vous. Ben non, justement, rien d’intellectuel, que du visuel, de l’éclate, du délire, un truc qui en jette et dans lequel il suffit juste de se laisser aller, se laisser déborder et accepter de participer.
Car au delà de son thème principal, la perte de repère en phase de rêve, Inception tient surtout du parcours initiatique, une véritable traversée en cascade de mondes oniriques construits à la manière de jeux vidéos et au sein desquels des pions doivent effectuer diverses missions pour que le héros puisse mener à bien la principale. Ni plus, ni moins.

A l’image de ses prédécesseurs, DiCaprio (encore une fois excellent) n’est que le matériau d’une démonstration ingénieuse, faculté de Nolan à plonger le spectateur lambda dans une intrigue abracadabrante au terme de laquelle il saura trouver seul ses propres clefs, à son propre rythme. Et c’est là l’une de ses plus grandes qualités : ne jamais prendre le public pour un imbécile. Chacun avance dans Inception en fonction de ses repères, sa faculté à appréhender les informations mais toujours selon les règles imposées par le réalisateur.

On en profite au passage pour saluer la prestation superbement glamour d’une Cotillard décidément très à son aise chez les Yankees (c’est bien la seule française qui en ait été capable jusque là) et qui semble confirmer sa capacité à séduire les plus grands noms du cinéma américain actuel.

Aucun commentaire: